Bilingue Ep 1: « C’est mettre les gens dehors de dehors »
Annie Archambault sur l’itinérance, entre soutien communautaire et répression policière
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Karl: Au cours des dernières années, il a été périodiquement question d’itinérance dans l’espace public au Québec. Que ce soit dans les discours médiatiques ou politiques, la présence des personnes en situation d’itinérance dérange.
Alia: Rather than addressing the conditions that produce homelessness, these dominant discourses often dehumanize, portraying the suffering of people experiencing homelessness as personal failings often related to addiction or mental illness.
Karl: Dans ce contexte, pas surprenant que les solutions envisagées s’articulent autour du contrôle et de la répression. D’ailleurs, depuis 2005, plusieurs rapports font état d’un profilage social à Montréal : chaque année, 40% des constats d’infraction remis sont destinés aux personnes en situation d'itinérance. Malgré les solutions proposées, le dernier rapport publié sur la question, en 2021, fait état d’une intensification du profilage social.
Alia: Today, we talk with…
Annie: Moi, c’est Annie je suis intervenante de proximité. Mon mandat principal c’est l'itinérance.
Alia: In our conversation Annie tells us about the challenges she confronts in the face of public hostility, explains why the police are a barrier to her work and shares a vision of community safety that is anchored in common sense and respect for all.
[01:25]
Alia: You’re listening to Brûler/Bâtir, a podcast about reimagining collective safety!
Karl: Brûler… parce que la police perpétue un cycle de violences sans assurer notre sécurité.
Alia: Bâtir… because we can invest in, and amplify, systems of care, justice, and safety without policing.
Karl: Tous les mois, on discute avec des personnes qui mettent en place ces systèmes à Tiohtià:ke/Montréal, et on apprend comment la police entrave leurs efforts.
Alia: I’m Alia.
Karl: J’suis Karl.
Alia : And we’re gonna be your hosts.
[01:50]
Karl: J'ai entendu parler de toi quand même depuis un petit bout parce que t'as un bon reach sur les réseaux sociaux. Après on s'est vu au festival Defund. Puis on sait que t'es pas mal occupée avec plein de projets pis plein de podcasts, fait que merci de prendre le temps de venir partager ton expérience avec nous aujourd'hui.
Annie: En premier faut juste que je dise que je parle vraiment à titre personnel, comme Annie Archambault, et je ne représente pas mon organisme. Tout ce que je dis par rapport à Defund The Police, c'est mon opinion personnelle.
….
Annie: Donc c'est quoi mon travail? Dans le fond, c'est vraiment large. C'est vraiment de rejoindre les communautés et les personnes soit marginalisées – on peut parler racisées, au seuil de la pauvreté – je vais faire de la livraison de matériel stérile, ça peut être les travailleuses du sexe. C'est extrêmement large comme mandat, c'est vraiment toute personne qui a un besoin, ça peut être des personnes sans papiers, et cetera. Mais mon mandat premier, c'est vraiment l'itinérance et c'est à moi d'aller les rejoindre dans leur milieu. Donc c'est moi qui se déplace et qui va dans leur milieu, s'il m'y invite bien sûr.
Karl: T'as débarqué avec ton gros sac de travail de rue.
Annie: Ouais, c’est mon bureau!
Karl: Des fois les gens sont comme, Ah c'est quoi le travail de rue? Puis c'est aussi simple que ça d'expliquer ce qu’est le travail de rue. Comme tu dis, c’est d’aller dans le milieu des gens.
Annie: Oui, c'est n'importe quel outil que la personne veut que je sois, et qui sont dans mon mandat bien sûr. On est très première ligne là, les intervenants de proximité/travailleurs de rue, on est souvent les seules personnes en fait qui sont là dans leur vie. Donc le lien aussi, Il est quand même fort en tant que travailleur de rue / intervenant de proximité.
Karl: C'est important de dire que t'es devenue un peu influenceuse des questions d'itinérance sur Tik Tok.
Annie: J’ai pas fait exprès!
Karl: Non, mais qu'est ce qui t'a amené là, puis comment ça s'est passé?
Annie: Moi, j'ai vécu de la violence conjugale, ça a comme déboulé consommation, qui a déboulé à vivre de l'itinérance cachée pendant comme 5 ans. Ensuite, j'ai trouvé un des rares programmes pour des logements avec accompagnement avec intervenant à Montréal pour les jeunes femmes. Et quand j'ai comme vécu ce que j'avais à vivre, j'étais encore dans ce logement, et j'ai fait bon, mais qu'est-ce que je fait avec tout ça? Tu sais comme, j'ai vécu tout ça, puis j'en fais quoi? Parce que pour moi, moi j'ai grandi dans une famille riche, la grosse maison et tout. Puis je pouvais pas croire ce que je venais de vivre. Comment le gouvernement et les citoyens traitaient les personnes en situation d'itinérance. Les programmes, le manque d'accessibilité, comment on est traité comme des moins que rien, pas par les organismes, par les citoyens. En tout cas, moi, ça m'a révolté tout ça. Puis je me suis juste dit OK, j'ai toute cette expérience de vie là. Mais j'en fais quoi? Et j'ai croisé une personne qui était pair-aidant en intervention alternative, que je croisais souvent dans des affaires, pis il me dit "t'as tu déjà pensé à être intervenante parce que tsé je te vois là-dedans". Puis j’étais comme, j'ai pas d’études. Puis il me dit c’est ça qu'on veut. On engage basé sur le vécu, puis on va te former là-dedans. J'ai fait 3 ans environ là-bas, puis après je suis devenue intervenante de proximité. Donc c'est ça, qui a amené à mon Tik Tok, mais c’était un accident…
Karl: Comment c'est parti?
Annie: C'est parti parce que je m'en allais travailler. Puis j'avais téléchargé Tik Tok ça faisait quelques mois, mais jamais à rien dire. Là tu sais, comme tout le monde, je regardais des recettes de pain. Puis je m'en vais travailler pis je vois 2 filles qui offrent un sandwich – tsé le Première Moisson avec le pain comme croûté épais de 2 cm là, à quelqu'un en situation d’ itinérance qui n'a pas de dents. OK. Puis là le gars il dit ben non merci, tsé super poliment, je ne veux pas de ton sandwich. Et elles étaient offusquées: elles l'ont traité d'ingrat, elles étaient "Ah ben là si t'as faim na na na tu vas manger le sandwich". Puis moi je suis là, je sais pas, j'ai juste pris mon iPhone, j'ai ouvert Tik Tok puis j'ai juste, dans une vidéo d'une minute, j'ai dit ben tu sais quelqu'un dans la rue, il a le droit d'avoir des goûts, il a le droit d'être allergique à la moutarde, il a le droit d'être végan, ça se peut qu'il ait pas de dents pour manger ton pain de première moisson en baguette dur comme du ciment. Puis il a le droit aussi de juste dire non. Puis si ça t'a fâché, son refus, l'action, tu ne l'as pas faite pour lui, tu l'as faite pour toi. Puis il est devenu viral. Mon premier vidéo est juste devenu, comme en deux heures, j'avais comme 50 mille vues là. Moi je voulais le supprimer, comme oh mon dieu non non non. Mais tout le monde était comme supprime-le pas! Et les gens dans les commentaires ils me posaient des questions comme "Ah ben est-ce que tu peux me dire c'est quoi qu'on peut donner à la place?" ou "Ah j'avais pas vu ça comme ça, qu'ils pouvaient être allergique. J'avais pas vu que les pamplemousses ça vient souvent en interaction avec les médicaments". Les gens me posaient des questions. Bien sûr, t'avais ceux qui étaient comme, des commentaires haineux et violents là, ça j'en ai dans chaque vidéo. Mais ça a comme parti une discussion. Fait que ça a commencé comme ça.
Karl: Pourquoi "Sur le bord de la ligne"?
Annie: Ben parce que je suis TPL, donc borderline, mais aussi je trouvais que les sujets dont je parlais sont très sur le bord de la ligne de ce qu'on peut dire, ce qu'on peut pas dire, ce qu'on peut faire, ce qu'on peut pas faire. C'est très sur le bord de la ligne du juger des gens versus être jugé par moi qui dis que ce que tu dis a pas d'allure. Fait que j'aimais beaucoup jouer là-dessus. Puis ça a aussi créé ma deuxième page Tik Tok, "L'autre bord de la ligne".
Karl: Puis cette deuxième page, en quoi elle est différente?
Annie: Ah, je fais des sandwichs aux tomates! Ça a pas rapport. J'avais tellement de haine, les gens ils me voyaient pas comme une personne, ils me voyaient comme quelqu'un de gauche, qu'on ne pouvait pas rire. Puis j’était plus capable de me faire dire je vais te tuer tous les jours. Bien je me suis dit je vais ouvrir une deuxième page que là c'est comme, oui, on peut rire avec moi, puis tsé on va faire des recettes ensemble. Puis une fois par semaine, je fais une recette avec ma grand-mère sur cette page là, tsé c'est la Annie à l'extérieur de l'itinérance. Puis ça a baissé les commentaires de haine de au moins, 70%. Ça a marché!
Alia: Tu dis comme... with your first video, you were trying to humanize these people, showing they have desires and preferences just like anyone else—some might not like mustard or choose to be vegan. And somehow, you became this figure who was only about giving advice on these matters, not seen as a fully rounded person.
Annie: Les gens m'ont déshumanisé parce que je parlais que de ça, ou des fois j'ai tu pas le droit d'aller en voyage. Dès que j'ai quelque chose d'extra — une fois j'ai mangé du Saint-Hubert et j'ai eu du haine pendant une semaine. Que ma sœur m'avait payé! Tsé les gens ils t'étiquettent tellement à ça qu'après t'as plus le droit à du confort. Je pense aussi que vu qu'ils savent que j'ai été dans la rue, j'ai pas le droit d'avoir plus de confort que eux qui ont jamais été dans la rue. Dès que j'ai plus, ils sont prêts à dire "Annie, c'est une bonne personne. Tant mieux si elle est sortie de la rue, MAIS elle est pas plus que moi."
Karl: Ben souvent on dirait qu'on, mettons on marche à Montréal, puis il y a beaucoup de personnes qui ont des réactions quand même rudes, vis-à-vis des personnes en situation d'itinérance. Pis j'ai l'impression souvent que c'est un manque de savoir agir, ils oublient que la personne c'est juste comme un humain normal.
Annie: Mais c'est plus facile.
Karl: Puis ils ont des réactions genre très sèches. Puis on dirait que les gens y s'attendent à avoir genre un guide. Genre "10 étapes faciles pour interagir avec une personne en situation d'itinérance". Alors que tout est comme contextuel, puis dépend de genre cette personne-là, toi, à ce moment-là.
Annie: Tu peux pas prendre un moule et l'appliquer sur toutes les personnes d'itinérance. Mais il y a beaucoup de haine ces temps-ci. Il y a des trends de jeunes qui vont au McDo acheter des McDo puis ils les écrasent en face des gens qui dorment. Il y en a un qui s'est fait poignarder cette semaine, deux autres à l'extérieur de Montréal qui se sont fait battre. Il y a vraiment une haine et de la violence là en ce moment qui est en train d'exploser envers les personnes en situation d'itinérance. À cause de la crise économique, la crise du logement, et les gens ne comprennent pas, et ils voient ça comme l'ennemi du "Pas dans ma cour". “Je ne veux pas te voir”. Je pense qu'ils voient ces gens-là comme des dérangés, comme des criminels. Tsé hier sur un de mes Tik Tok quelqu'un qui a dit "mais mes enfants pourraient voir ces gens-là".
Alia: What does that mean?
Annie: Like you're scared for your kid to see someone that doesn't have a house. Like, are you OK?
Alia: Oui, je pense que, you know there's a not a guide but asking yourself do I feel unsafe? or uncomfortable? And often you just feel uncomfortable. And that’s actually about you and not about the other person.
Annie: But it’s okay to feel uncomfortable.
Alia: Yeah there’s nothing dangerous about feeling uncomfortable!
Annie: And then you can learn about it and feel less uncomfortable later on. But if you just keep feeling uncomfortable and turning it into hate and saying things online that aren’t true, that’s the problem.
Alia: It’s like there’s this moment we engage with all the time, when we see people who are in situations that are different than ours, where we feel uncomfortable or inconvenienced by that reality, and it could be a moment of opportunity: "Wow look at the world I’m participating in, look at the systems I benefit from that actually require other people to be marginalized" – but instead we often react by being like "Oh my gosh I’m so upset or inconvenienced by this, how do I never see it again". Maybe the abolitionist question is how do we transform those feelings into new possibilities, and not into new violences.
Karl: J’suis quand même intéressé de savoir comment ça affecte ton travail justement de travailler dans un contexte d'intolérance?
Annie: Ouais, c'est sûr que j'ai besoin de cohabitation sociale, pour que ça se fasse bien, pour bien faire mon travail, ce qui est difficile. Mais j'ai des liens avec des petites places dans le quartier où je travaille, avec qui justement la cohabitation fonctionne bien. Mais là, le Pas dans ma cour est… juste je pense dans les deux derniers mois, ça fait trois fois que je déménage la même personne qui se fait démanteler. L'intolérance a un boom à Montréal. Les démantèlements, je pense que cet été ils avaient compté le nombre de démantèlements enregistrés par la ville, ce qui veut dire que ça compte pas les autres démantèlements, c'était à 240 au mois d'août. C'est plus qu'un par jour!
Alia: Peut-être juste pour dire que "Pas dans ma cour" c'est comme "Not in my backyard", c'est une expression qu'on utilise souvent en anglais aussi pour dire que, we don't want any of these organizations or any signs of systemic challenges in our own proximity.
Annie: Une autre façon de faire – moi j'appelle ça des démantèlements par intimidation par la police — c'est d'aller voir les personnes beaucoup beaucoup de fois, tous les jours, plusieurs fois par jour, de commencer de façon un peu sneaky — "C'est quoi ton nom… je vais pas te rentrer dans le système.. tu sais-je t'ai amené du McDonald…" — qui va soit amener à des arrestations plus tard, ou que les personnes ils s'en vont quand la police vient. C'est comme ici à l'appartement, si la police vient chez toi cinq fois par jour, tu ferais "Ben je m'en vais". Tsé, c'est la même affaire là. Parce que là la police elle dit que ça existe plus les démantèlements parce qu'ils ne brûlent plus des tentes ou ne détruisent plus des tentes. Mais tu le fait d'une autre façon. Puis ils appellent pas ça des démantèlements, ils essayent de s'enlever ça des mains. Mais y'a encore des tentes qui sont détruites par eux par contre.
Karl: Mais d'ailleurs, la ville a embauché genre un agent de liaison qui était attitré au démantèlement de campements.
Annie: Pour le double de notre salaire...
Karl: Faque, il y a de plus en plus de demandes pour justement que ces gens-là se déplacent parce que le contexte est difficile. Fait que ça mobilise ton temps et tes énergies à devoir relocaliser ces personnes, alors que tu sais que tu vas devoir faire la même chose.
Annie: Ben on s'entend, c'est pas moi qui les démantèle là! C'est pas moi qui dit "tu dois quitter".
Karl: Non, non! Mais c'est que toi tu les accompagnes.
Annie: Oui, c’est ça. Je peux t'aider à amener du stock là, mais je veux dire c'est jamais moi qui va dire "tu dois quitter". Mais, j'ai l'impression malheureusement que des fois la ville ou la police, peu importe, utilise le communautaire d'une certaine façon pour que ça apparaissent comme "Oh on les démantèle pas parce qu'ils sont au courant en avance et donc ils vont l'aider à déménager". Moi, je compte ça comme un démantèlement fait par la ville.
Alia: It seems quite obvious that there's a lot of money that goes into getting people to leave encampments, destroying encampments, a lot of money and ressources, and we know that when people leave, they have to go somewhere else – faque c’est comme une solution complètement illogique. Ça fait pas du sens. Unless the objective is to be like out of sight, which it is, but even that doesn't work. It seems like you do work that’s constantly in tension with that. Do we know how we could use that money to do something other than just constantly brutalize and scare people and make them move constantly?
Annie: C'est mettre les gens dehors de dehors.
Annie: Ouais, mais juste le démantèlement du campement Notre-Dame a coûté plus d'un demi millions de dollars pour une journée pour payer les policiers.
Karl: C'est scandaleux. C'est scandaleux. C'est toutes les conséquences aussi qu'on arrive pas à calculer, mais genre des médicaments qui ont été envoyés aux poubelles, toutes les procédures médicales, judiciaires pour retrouver les objets des personnes qui sont demandées. C'est incalculable les coûts, c'est astronomique ce qu'on pourrait réinvestir.
Annie: Mais combien de logements de HLM qu'on pourrait retaper avec ça? Il y a plein de logements de l'OMH qui sont vides parce qu'ils ont pas d'argent pour les rénover, les logements 25%. Mais moi je pense qu'avec un demi million de dollars, t'aurais pu en retaper quelques-uns! Puis ces gens-là aussi qui sont en commun, c'est important de comprendre que c'est une façon aussi pour eux de s'exprimer, puis de dire "J’existe, je suis là. Je veux juste un logement." Pas un logement gratuit. Ils veulent un logement abordable, un logement à 25%, un logement avec accompagnement. Et à la place d'offrir ça, on paye des policiers, des policiers montés à cheval, des hélicoptères, des brigades, pour leur dire, "Va t'en dehors de dehors". Il va juste aller à côté! Tu viens de dépenser des loyers! Moi je le vois en appartements. Combien d'appartements?
Karl: Mais c'est ça, et pendant ce temps-là on crée rien. On fait juste comme jeter l'argent de l'autre bord des fenêtres.
Annie: Ouais. Les démantèlements pour la gentrification. Ça paraît pas bien pour une ville. C'est pas beau pour une ville qui essaie d'amener des personnes à venir en voyage à Montréal. Le night life, les prix des condos – s'il y a un campement à côté de ta maison, ta maison perd de la valeur. Ton condo perd de la valeur. C'est une question d'argent. C'est une question de beauté. C'est une question de gentrification. C'est ça.
Karl: Je veux revenir à tantôt quand tu parlais de, ben que tu sens qu'il y a un peu une instrumentalisation de la police dans ton travail, qui – ben tsé y'a plein d'études qui supportent ça: la police qui profite de relations que le communautaire tisse à faible coût, puis après s'invite dans ces relations là, ce qui fait qu'on oriente un peu des relations que vous avez pris du temps, puis de l'énergie, puis des émotions à bâtir. Qu'est ce que tu sens par rapport à ton rôle qui est peut être en train de se transformer?
Annie: J'essaie d'être neutre. Dans le sens que quand je travaille, je suis là pour la personne. Peu importe c'est quoi mes croyances à l'extérieur, peu importe ce que je pense à l'extérieur. Je mets ça de côté. À la seconde que la police arrive, je me retire un peu sur le côté. Je parle plus quand je vois que j'ai plus rapport. Je vais dire écoute, on va se revoir une autre journée, pis je quitte. Ça c'est si il n'y avait pas de besoin. Ce que je trouve un peu, tu vois, insultant, que pendant que je suis en intervention, la police s'en viennent. Ils savent que je suis travailleuse de rue. Ils savent que je suis en train de travailler. Pourquoi tu viens? Je sais pas là. Je pense aussi que ça me donne des fois l'opportunité de dire aux policiers, "écoute ça, ce que tu viens de faire, c'est de l'intimidation, ou c'est du harcèlement". Mais après, est-ce que l'écoute est là de leur part, ça c'est un autre sujet. Est-ce qu'ils sont prêts à entendre que leur uniforme, qu'ils le veulent ou qu'ils ne le veulent pas, représente une forme d'oppression, et que ton drapeau Blue Lives Matter est dérangeant et insultant? Puis, tu sais, à chaque fois, j'essaye. J'ai essayé très souvent d'amener des points. Mais c'est toujours comme "Non, non non, c'est toi qui voit de la mauvaise façon". C'est comme toujours moi dans le tort. Je parlais justement avec un policier d'un quartier, qui était même pas mon quartier de travail. En fait, ça a donné qu'il était là. Puis il me dit, "Tu sais Annie, moi, pis toi, il faut qu'on travaille comme ça." – tsé il fait vraiment un geste de main dans la main. Je fais comme "Non, malheureusement." Pis je dis "tsé tu peux pas aider..." J’ai mis beaucoup mon Defund The Police, mon ACAB derrière moi, puis j'ai dit "T'auras beau toi, en tant que policier, avoir tout le vouloir du monde d'aider ces personnes là, c'est qui qui a demandé à ces personnes là si ils veulent être aider par la police?" Parce qu'on a créé tous ces programmes-là, mais moi j'ai jamais entendu quelqu'un dire, "on a demandé aux usagers si c'est ça qu'ils voulaient".
Alia: Yeah who wants to be helped by people who have guns and can ticket you?
Karl: Mais pourquoi la police veut faire ça? Pourquoi?
Annie: Pour bien dormir le soir. C'est pour se coucher le soir je pense, en se disant "J'ai aidé". Parce que sinon ton travail, I guess, en tant que policier, serait que de la marde.
[19:55]
Interlude narratif sur le “community policing” / la “police communautaire”
Orlando: Pour comprendre pourquoi la police prétend faire de la "prévention", il faut comprendre l’histoire du « community policing », aussi appelé « police communautaire ».
Très brièvement: le community policing c'est une tendance dans les corps de police nord-américains à vouloir travailler en prévention, en insérant des policiers dans les communautés, les écoles, les hôpitaux; et cette "police communautaire" voudrait reconstruire un lien de confiance avec la communauté.
Et d'où vient cette idée? Ça commence dans les années 70. Alors que les mouvements sociaux dénoncent le rôle oppressif de la police, et que les chercheurs et la police-même commencent à reconnaître que le crime ne peut pas être réduit par la répression, la police dit: pas de problème! On peut s'occuper de tout ça! On peut neutraliser le militantisme, résoudre les problèmes sociaux, et continuer notre rôle répressif.
Avec la naissance du community policing, le rôle de la police est élargi. La police devient une réponse à tous les problèmes sociaux. Et ça, ça a toujours été présenté comme une réforme progressiste. Pourtant, ses effets sont extrêmement délétères. En y regardant de plus près, le community policing apparaît comme un “gant de velours” pour cacher le “poing de fer” de la répression policière.
Dans beaucoup de villes Nord-Américaines, les principes du community policing ont été instrumentalisés pour mettre en place des pratiques policières brutales contre les personnes itinérantes. À Montréal, dans les années 2000, le SPVM a manipulé des consultations publiques pour justifier une campagne de répression contre les personnes itinérantes. L'harcèlement, la brutalité, et la judiciarisation ont alors été présentés comme étant la "volonté du public".
Ce qu'on voit donc c'est que, souvent, le résultat du "community policing" c'est une extension de la répression policière.
Mais il faut comprendre que, même si c'est pas toujours un complot ou le produit de mauvaises intentions, c'est inévitable. Le travail policier se distingue de tous les autres jobs par une seule chose: sa fonction est de répondre à des problèmes en utilisant la violence d'État. Comme le "community policing" élargit le champ d'action de la police, il élargit simplement le nombre de situations auxquelles on décide de répondre avec la violence.
C’est pour ça que la Coalition Defund, et le mouvement abolitionniste, disent que la police ne doit pas et ne peut pas faire de la prévention.
[22:08]
Alia: Thinking about cops as violence workers is a kind of rejection of a community policing model which tries to reframe policing as something that can address all these social problems. And originally I think policing did use to be much more reactive.
Annie: C’est qu’il n’y a pas de prévention dans la police.
Karl: J’ai l’impression qu’il y a une tension entre l'organisation de la police, qui veut aller chercher du financement, et les policiers eux-mêmes, qui dans la hiérarchie policière sont dévalorisé de faire du travail du care. C'est vraiment vu comme quelque chose de féminin et dévaloriser versus genre les enquêtes. Je pense qu’ils sont en tension, mais l'organisation elle veut aller de l'avant. Mais tout le monde est comme, pourquoi vous voulez faire ça?
Annie: Mais tu peux pas aller de l'avant contre les personnes que tu veux aider! D'où les escouades mixtes...
Karl: Oui! Mais veux-tu qu’on en jase?
Annie: Oui!
Karl: T'as entendu parler du rapport qui est sorti sur les escouades mixtes?
Annie: Ah, c’était un bon rapport.
[23:00]
Interlude narratif sur les Escouades Mixtes / Mixed Squads
Orlando: Les escouades mixtes, c'est une extension du community policing. C'est des équipes composées d’un policier et d'un intervenant social qui interviennent en duo. Selon la Ville et la police, leur rôle est de répondre aux besoins de populations vulnérables, tout en améliorant leur rapport avec la police.
Sauf que, dans les faits, c’est pas du tout ça. Récemment, le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal, qui représente une centaine d’organismes communautaires, a publié un rapport qui dénonce durement les escouades mixtes.
Selon les intervenants, les escouades nuisent aux personnes en situation d’itinérance: en fait, en multipliant la présence policière, elles amplifient leur sentiment d’être surveillés et contrôlés, et elles pourraient même augmenter leur risque de judiciarisation.
En plus de ça, elles compliquent le travail des intervenants, elles créent des situations de crises, et elles éloignent les personnes des services.
Elles créent aussi des tensions au sein du milieu communautaire entre les organismes qui acceptent de collaborer avec la police en échange de financement, et ceux qui refusent.
Et surtout, les escouades mixtes s'accaparent des sommes importantes qui devraient servir à financer des initiatives communautaires.
En conclusion, les recommandations du rapport sont claires: il faut immédiatement dissoudre les équipes mixtes, et rediriger leur financement vers des programmes entièrement dirigés par le milieu communautaire, dont plusieurs qui existent déjà.
[24:24]
Annie: Puis le rapport disait au final, "defund the police". C’est vraiment ça. Abolir les programmes, prendre l’argent et le mettre dans le communautaire. Ce qui pour moi est égal à defund the police.
Karl: Je suis content que ce rapport-là est sorti parce que même dans les milieux progressistes, puis genre de gauche, les gens étaient comme "Ah mais ces escouades là c'est bien!", comme "Ouais c'est progressiste puis ça aide les personnes". Faque moi je suis vraiment content qu'il y ait enfin un contre-discours qui existe sur comme: "mais non il y a plein de conséquences".
Annie: Puis pour moi c'était important de parler d'escouades mixtes, parce que pour moi, c'est ri-di-cule. C'est la chose la plus ridicule. On veut redorer la police na na na, mais la police a pas été créée pour ça. Ça enlève pas le profilage social. En fait, ils leur donnent des spots. Puis souvent ce que j’ai remarqué c'est qu'il y a des usagers que – on va dire sa santé mentale est moins top cette journée là, pour X ou Y raison. Mais des fois il va dire des choses à la police qu'il aurait peut-être pas dit autrement, tsé, à avoir été dans un meilleur état dans sa tête. J'ai déjà eu quelqu'un qui a dit "Sans faire exprès… ils me parlaient me parlaient me parlaient, j'ai pas remarqué, ils m'ont comme fait sentir confiance, je leur ai donné un spot de campement, puis le lendemain c'était démantelé." C'est comme… Ou "ils m'ont m'amener du McDonalds, mais deux jours après ils m'ont demandé c'est qui qui vend dans le quartier?" Tsé, c'est fou. Pis les gens là, tout d'un coup, ils se sentent aidés par la police puis BANG – il va y avoir comme un coup de couteau, quelque part, à un moment donné. Pas nécessairement là, peut-être dans trois mois, mais c'est rare que je n’ai pas vu le couteau arriver.
Alia: When we think of the history of initiatives like this in policing, it’s always the case that you’re given something, and then you’re asked in return to offer information. It’s always a conditional offer and it’s a way of converting some people onto your side so you can mobilize your power against other people.
Annie: Faut que tu le vois pour comprendre, faut que tu le vives. Je pense qu'il y a des gens qui comprennent pas que si tu le vis pas, c'est tough. C'est tough de se dire que quelqu'un qui a jamais eu la réalité de faire face à la police ou être criminalisée par la police ou d'être profilée socialement ou racialement, comprennent que la police n'est pas là pour aider. T’sais au final, par exemple, si ECCR apprend qu’il y a un crime il est obligé d'agir. Et moi j'appelle ça des crimes par survie. Faque pour moi s'est annulé, ça annule le crime. S’il y a un crime par survie pour moi il n’y a pas de crime. Un vol dans une épicerie, c'est techniquement un crime. Mais pour moi c'est pas un crime.
Alia: And maybe just to emphasize, mixed squads are a very clear way of increasing the police budget and giving the police more resources. And like you were saying, they're often framed as this positive move on the left, but from at least a financial point, it's just very clear they are counter to any sort of defunding initiative.
Annie: Puis je pense plus qu’on travaille avec eux, malgré nous, plus qu'ils demandent du budget parce qu'ils sont comme "Mais oui, ça fonctionne, on a une table de concertation avec le communautaire, donc ils veulent qu'on soit là, donc on demande plus de budget". Puis il y a tout ce cercle là je trouve.
Karl: Est-ce que – ça revient à une question que je t'ai posée tantôt – mais est-ce que tu sens que ton travail peut devenir de plus en plus carcéral, puis axés dans le contrôle.
Annie: Ben, je démissionne si c'est ce qui arrive à mon job. Je pense pas. Non mais je pense pas, parce que je pense que heureusement on est rendu à une ère dans le communautaire – pis là c'est mon opinion – on est rendu dans une ère dans le communautaire que on voit les conséquences reliées à ces escouades-là. Moi je dis souvent sur internet on est comme à un point de non-retour parce que les gouvernements n'ont pas agi assez vite sur plein de choses, okay? Donc je pense que là le communautaire se fâche et est tanné de ne pas parler. J'ai plus d'espoir que le communautaire va décider de ne plus travailler avec les brigades.
Karl: Mais tu trouves pas qu’il y a une polarisation qui s'en vient dans le communautaire? Les organisations qui ont le plus gros budget, encore une fois, c'est le communautaire qui remplit la fonction de l'État.
Annie: Parce que oui il y a des organismes communautaires qui aiment la police. Les grosses places comme ça, c'est qu'ils répondent à ce que le gouvernement veut. C'est pour ça qu'ils ont des millions comparés à des organismes communautaires dans lesquels je travaille – puis qu'on compte nos cents genre. Fait que plus que tu donnes ce que le gouvernement veut, plus que tu travailles avec la police, plus travailler avec le CIUSSS, plus t'as d'argent. Ah, mais le plus tu va contrôler les gens.
Alia: We really need money in these small situated organizations with people like you who really know these spaces, who are able to think about how to help people in complex ways, not always replicable across time and space. All these big government funds where all the money comes from can only imagine models where there's a lot of transparency, and also where control and geographically, nationally, provincially expanded, and those two things seem to be always at odds.
Karl: C'est quoi les limites dans la réduction des méfaits ou dans la lutte justement pour le définancement de la police, vis-à-vis la lutte à l'itinérance? Comme, qu'est ce que tu penses? Est ce qu'il y a des points morts qui existent, des choses qu'il faudrait que même dans le milieu militant on continue de comme réfléchir à?
Annie: Nous, nous les intervenants, on est vraiment fatigués. Puis on est, on n'a pas l’énergie de faire ces luttes-là. J'ai l'impression que c'est les citoyens qui sont amenés à faire cette lutte là. Je sais pas si ça fait du sens avec la question là. Dans le sens que moi souvent je suis invitée à plein de manifs, mais tu me verras jamais quasiment. Après ma journée de travail, d'avoir déjà défendu tout ça, j'ai pas en plus envie d'aller à une manif tsé. Il y a plein d'intervenants justement qui sont comme "ah je suis trop fatiguée, je peux pas!" On est, on est trop fatigué pour la lutte sur le côté. Puis je pense que c'est ça un peu le point mort. Je trouve que les organismes devraient...moi je comprends pas pourquoi on n'est pas en train de brûler le pont en disant c'est ça ou des logements. C'est pour vrai, je pense que c'est un sentiment que beaucoup de personnes a dans le communautaire comme point mort et de faire "eh on s'en va défoncer quelque chose et on va camper devant la mairie pendant une semaine maintenant", puis on est fatigué de toute façon. C'est comme le point mort que je vois dans la lutte.
Karl: Genre une déconnexion entre les milieux militants puis le milieu pratique.
Annie: Oui exact.
Karl: Qui partage des intérêts vraiment similaires.
Annie: Ouais. Mais avec raison, avec raison.
Karl: Puis trouves-tu que justement les milieux militants abolitionnistes pour le définancement de la police arrivent bien genre à partager, puis à être en commun avec les milieux pratiques. Il manque-tu d'espaces de parole? ou est ce que mettons les luttes pour l'abolition, la police, les prisons, te parlent?
Annie: On n'en parle pas tant que ça au travail parce que je pense pas qu'on peut. Je sais pas. Publiquement ça serait jamais dit.
Alia: That’s the hope of the coalition to really build those connections not just theoretically but like with our actual relationships and on the ground and in protests.
Annie: Je pense ici que tous les il y a beaucoup de financement dans les organismes qui viennent de la santé publique et de la sécurité, dans la police. C'est comme cracher dans la main de la personne qui te nourrit entre parenthèses, qui fait, tu sais, la plus grosse partie de budget peut venir de là. Faque, j'ai l'impression que cette crainte d'être coupée du financement, d'être comme "Mais là si on le dit publiquement, on se tire dans le pied, puis on sera pas ouverts l'année prochaine" Faque moi je verrai plus comme un représentant des organismes qui veulent joindre, mais après y a aussi le "si c'est public qu'on a joint, est-ce qu'on va se faire couper?" Mais plus qu'il y a d'organismes qui vont le dire haut et fort et qui va rejoindre, là après la santé publique peut pas couper tout le monde. Il pourra pas faire genre "Parce que t'es contre les programmes d'escouades mixte, on te coupe 200,000$". Tsé on dirait qu'il faut ceux qui osent le premier pas en fait.
Alia: Yeah, so maybe that brings us to our last question, which we're going to ask all our guests and it riffs off the title of the podcast. What would you like to build up in the place of the police?
Annie: Mhmm! Plein de choses. Je veux plus de programmes, plus de programmes différents qui répondent à différentes réalités. Que ça soit exemple des personnes sur le spectre de l'autisme qu'on ne peut clairement pas aller à la maison du père avec 300 personnes, OK. Je veux des petits hébergements, des petits programmes, des petits logements, des logements abordables à 25% avec intervenant sur place avec infirmier, médecin – je veux tout, partout. Dans le sens que on n'a pas besoin d'un programme de 800 étages. C'est juste dans chaque quartier, il devrait y avoir un petit hébergement, des hébergements qui répondent à pleins de réalités différentes, un centre de jour, un site de consommation. Tu sais le Pas dans ma cours s’il est là, c'est parce que y en a tellement pas beaucoup dans chaque quartier, c'est toute centralisé à la même place, que le Pas dans ma cour est tellement fort dans les autres quartiers. Mais si on commence à juste ouvrir plein de petites places un peu partout, il y aura moins de Pas dans ma cour parce que ça va être obligatoire et accepté. Moi, c'est ça que je ferais avec l'argent de la police. Et peut être que, je sais pas, je mangerais mieux, un petit meilleur salaire là… sans aller à la banque alimentaire après le travail, tu sais des choses comme ça là? C'est du cheap labour, on est pris pour du cheap labour. Mais imagine là, il y en a un il faisait 170,000 par année. Moi j'avais déclaré 31,000.
Karl: Il y a plein de policiers qui font dans les 100,000.
Alia: And it would make a significant difference if the salaries were higher to motivate people towards investing in a distributed economy of care that's complex but isn't foregrounded in ya know… violence. Peut-être tu peux juste finir cette phrase, comme la sécurité communautaire veut dire quoi pour toi?
Annie: Moi je pense que public safety, ça veut dire cohabitation sociale. Exemple, on parle beaucoup dans les médias de l'affaire de Saint-Henri, le site d'injection inhalation supervisée, tout le monde est en train de dire pas proche de mes enfants – mais c'est pour ça qu'il y a ça! Je pense que les gens comprennent pas le but de nos projets, qu'on est tous d'accord, que c'est la sécurité pour tous, qu'on est tous d'accord. C'est pour les enfants aussi qu'on ouvre ce genre de placement, en plus de la toxicité des drogues et tout ça, mais ça c'est un autre sujet. La sécurité publique il faut que ça soit pour tous. Il y a de tout, dans toute classe sociale mais on vise tout le temps les pauvres, comme on disait tantôt, que c'est eux qui sont comme les dégueux de la société à cause de leur statut social. Pour moi, la sécurité publique, c'est des programmes pour tout le monde.
Karl: Ben j'aimerais ça conclure en disant bravo pour tout le travail que tu fais, pour la mobilisation que tu fais. Le milieu communautaire, on leur laisse pas la chance d'avoir accès au discours public. Faque effectivement, tu dois sentir cette pression là, et genre tu représentes une voix, mais bravo en tout cas d'amener les discours de réduction des méfaits, puis les enjeux communautaires dans des espaces grand public.
Annie: Merci beaucoup.
Karl: Merci Annie.
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Karl: Brûler Bâtir est crée par… Alia, Karl, Abby, Zo, and Orlando.
Karl: Gros merci a Annie pour être notre première invitée. Vous pouvez suivre Annie sur Instagram : @lesdeuxbordsdelaligne ou elle crée du contenu et sensibilise à la cause de l'itinérance.
Alia: The report we discussed on mixed squads is linked in the show notes where you can also find a full transcript of the episode in English and French. Our outro song is by Kimmortel off their new album Shoebox. We do this work in Tiohtià:ke on the unceded lands of the Kanien'kehá:ka. And special thanks to Orlando for reading and writing the narrative interludes you heard on community policing and mixed squads.
Karl: Abonnez-vous au podcast et partagez! Merci d’avoir été des nôtres et on se dit à la prochaine.